FAQ sur la rente d’invalidité

Régime des Rentes du Québec et personnes handicapées :

Quand retraite rime avec discrimination

FOIRE AUX QUESTIONS

LISTE DES ABRÉVIATIONS ET LEXIQUE CDPDJ : Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse CS : Cour Supérieure du Québec Jurisprudence : Décisions des tribunaux qui créent certaines règles générales de droit. Par exemple, la Cour Supérieure a déclaré qu’elle n’avait pas la compétence de prendre des décisions par rapport à la Loi sur le régime de retraite du Québec. Seul le TAQ à cette compétence. Cette décision a fait jurisprudence, il s’agit donc d’une règle de droit que l’on peut tenir pour acquis même si elle n’est pas dans une loi. La Loi : Loi sur le régime de retraite du Québec MÉMO-Qc : Moelle épinière et motricité Québec RéRQ : Régime des rentes du Québec RQ et le Procureur général du Québec : les défendeurs RI : Rente d’invalidité RQ : Retraite Québec RR : Rente de retraite TAQ : Tribunal administratif du Québec

Cette foire aux questions est le résultat d’une conférence organisée par MÉMO-Qc le 13 décembre 2021 qui présentait l’état d’avancement des recours devant les tribunaux pour contester la pénalité discriminatoire que Retraite Québec (ci-après « RQ ») applique aux bénéficiaires de la Rente d’invalidité et de retraite payable avant 65 ans (ci-après « RI »). Elle n’aurait pas pu voir le jour sans la généreuse participation de Me André Laporte, Ad. E. associé principal de la firme Laporte & Lavallée, ni sans l’implication de la centaine de participants qui ont nourri la plupart des questions présentes dans cet outil. 

Il faut mentionner que cette foire aux questions a été mise à jour en date du 1er février 2022 et qu’elle vise à fournir des informations générales. Considérant que chaque cas a ses particularités, rien dans ce document ne doit être interprété comme une opinion ou un conseil juridique. En espérant que ces initiatives de l’organisme Moelle épinière et motricité Québec (ci-après « MÉMO-Qc ») pourront faciliter votre compréhension des choses. Pour plus d’informations, veuillez communiquer avec l’organisatrice communautaire au volet défense des droits de l’organisme, Anabelle Grenon Fortin par courriel à l’adresse agrenonfortin@moelleepiniere.com ou par téléphone au 514 341-7272 poste 219.

Liste des questions par thématiques

A.     Questions générales sur la pénalité : 4

1.      Texte législatif à l’origine de la pénalité: 4

2.      Quels sont les effets et le mécanisme de la pénalité ?. 4

3.      Est-ce vrai que le programme de la Sécurité de la vieillesse (incluant le supplément de revenu garanti) offert par le gouvernement fédéral compense les pertes financières découlant de la pénalité ?. 5

4.      Au niveau du régime des pensions du Canada et dans les autres provinces, est-ce que les mêmes pénalités s’appliquent ?. 6

5.      Si une personne reçoit une RI à 40 ans et qu’elle a maintenant 65 ans, la pénalité s’appliquera-t-elle à partir de 40 ans ou de 60 ans ?. 6

6.      Est-ce qu’on peut renoncer à percevoir la RI entre 60 et 65 ans pour ne pas avoir de pénalités sur notre RR?. 6

7.      Intégration de la RI : Si mon assurance privée ou la SAAQ m’oblige à réclamer la RI ou la RR, pour avoir droit aux prestations d’invalidité, vais-je subir la pénalité à 65 ans?. 6

B.     Questions sur les recours présentement au TAQ et devant la CS. 7

8.      Comment MÉMO-Qc en est-il venu à supporter ce dossier ?. 7

9.      Description des recours en cours : Quels recours sont présentement en cours ?. 9

●       Recours collectif de 2021 : 9

●       Recours individuels devant le TAQ : 10

10.    Les cas types : Qui sont les requérants dans les recours individuels et en quoi la diversité de leurs profils est-elle importante?. 11

11.    Impact des recours en cours : Les conclusions de ces recours auront-elles des impacts sur moi ?. . 11

12.    Effet rétroactif des recours en cours : Les personnes de plus de 60 ans n’ayant pas participé au recours vont-elles cesser de subir les pénalités et seront-elles remboursées pour les pénalités déjà payées?. 12

13.    Quand verrons-nous les conclusions du jugement ?. 13

C.     Recours possible pour la contestation de la diminution des prestations : 14

14.    Étapes de la contestation : Quelles sont les étapes à suivre pour espérer profiter des effets des recours en instances au TAQ ?. 14

15.    Quand dois-je faire ma contestation?. 16

16.    Puis-je faire ma contestation avant la réception de l’Avis de modification, par exemple si je reçois un simple avis m’informant des changements qui s’appliqueront à ma RI?. 17

17.    Dans un recours au TAQ ou à la RéRQ, dois-je être représenté par un avocat? Est-ce pertinent de se faire représenter par un avocat?. 17

D.     Votre délai de contestation est dépassé. 18

18.    Recours résiduels : Vous avez reçu la décision de Retraite Québec de diminuer vos prestations et votre recours au TAQ est échu, quels recours vous reste-t-il?. 18

E.      Questions générales sur les rentes d’invalidité. 19

19.    Pour être admissible aux prestations de la RI, il faut être atteint d’une invalidité grave et prolongée. Que veut dire la Loi par « grave et prolongée »?. 19

20.    Revenu de base : Une personne de moins de 65 ans percevant la RI peut-elle travailler sans que le montant de sa RI diminue?. 20

21.    Que prend en compte Retraite Québec pour calculer la RI avant 65 ans?. 20

F.      Annexe 1 : Exemple d’Avis de modification officielle de RQ visant la diminution de vos prestations à 65 ans VS un simple avis. 21

A.   Questions générales sur la pénalité :

1.    Texte législatif à l’origine de la pénalité:

120.2 de la Loi sur le Régime de rentes du Québec (ci-après « la loi »)

120.2 Le montant mensuel initial de la rente de retraite d’un cotisant est réduit de 0,5% pour chaque mois pour lequel il a eu droit, entre 60 et 65 ans, à une rente d’invalidité en vertu de la présente loi ou d’un régime équivalent.

Le montant mensuel initial de la rente de retraite qui devient payable à un cotisant après le 31 décembre 2013 est réduit de 0,5% auquel est ajouté un coefficient d’ajustement multiplié par le rapport entre 25% de la moyenne mensuelle des gains admissibles de base du cotisant calculée selon les articles 116.1 à 116.5 pour l’année au cours de laquelle la rente de retraite devient payable et le maximum mensuel de base de la rente de retraite pour l’année calculé selon l’article 116.6, pour chaque mois pour lequel il a eu droit, entre 60 et 65 ans, à une rente d’invalidité en vertu de la présente loi ou d’un régime équivalent.

Pour l’application du présent article, le coefficient d’ajustement est de 0,03% si la rente de retraite devient payable en 2014, de 0,06% si elle devient payable en 2015 et de 0,1% si elle devient payable en 2016 ou lors d’une année subséquente.

La réduction n’est toutefois pas applicable à un cotisant qui est devenu invalide, au sens de l’article 96, avant le 1er janvier 1999.

2.    Quels sont les effets et le mécanisme de la pénalité ?

Cette pénalité s’applique à une personne dont l’invalidité est survenue après 1999, et qui a directement ou indirectement reçu une RI de la RéRQ entre son 60e anniversaire et son 65e anniversaire.

À 65 ans, la RI sera automatiquement remplacée par la rente de retraite (ci-après « RR »). Cette RR sera réduite de 30-38% si la rente a été payée à compter de 60 ans (ex : 0,5% par mois à compter de 60 ans) pour chaque année de versement de la RI entre ses 60 et 65 ans.

= 600$ – (30% de 600)

= 600$ – 180$

= 420$

3.    Est-ce vrai que le programme de la Sécurité de la vieillesse (incluant le supplément de revenu garanti[1]) offert par le gouvernement fédéral compense les pertes financières découlant de la pénalité ?

Non. Il s’agit d’un des arguments de RQ et du Procureur général du Québec (ci-après : les défendeurs) dans les recours en cours (Voir Q9 pour plus d’information sur ces recours). Nous tenterons de le contrer. Voici comment nous contredisons cet argument :

D’abord, le programme de la Sécurité de la vieillesse n’est pas une compensation puisque tous les Canadiens de plus de 65 ans y ont droit, même s’ils ne sont pas en situation de handicap.

Ensuite, l’argument voulant que cette pénalité soit atténuée par le supplément de revenu garanti n’est qu’en partie vrai. Nos calculs démontrent que le bénéficiaire devra supporter 50 % de la pénalité ou plus[2]

Pour aller plus loin juridiquement, par cet argument, RQ souhaite justifier une disposition de la Loi, dont l’origine est provinciale, grâce à des programmes provenant d’un autre régime gouvernemental, soit le fédéral. Or, cette justification est problématique, car le gouvernement fédéral pourrait couper à tout moment les montants du programme de la Sécurité de la vieillesse sans que le gouvernement provincial n’ait son mot à dire. Or, la jurisprudence[3] est claire quant au fait que l’on ne peut pallier une législature discriminatoire par un autre régime étatique.

4.    Au niveau du régime des pensions du Canada, et dans les autres provinces, est-ce que les mêmes pénalités s’appliquent ?

Non, cette pénalité n’existe qu’au Québec.

5.    Si une personne reçoit une RI à 40 ans et qu’elle a maintenant 65 ans, la pénalité s’appliquera-t-elle à partir de 40 ans ou de 60 ans ?

Entre 60 et 65 ans seulement. Elle ne subira pas de pénalité pour les prestations reçues entre 40 et 59 ans.

Dans les recours existant devant le TAQ, nous soulevons un principe de discrimination basée sur l’âge. Pourquoi le gouvernement cible-t-il des personnes précisément âgées de 60 ? Nous croyons que le choix de 60 ans plutôt que n’importe quel autre âge est arbitraire et injustifié et ce, sans motif raisonnable. 

6.    Est-ce qu’on peut renoncer à percevoir la RI entre 60 et 65 ans pour ne pas avoir de pénalités sur notre RR?

Si un individu ne fait pas de demande de RI, il ne subira pas de pénalité à l’âge de 65 ans, à l’exception des victimes d’accident de la route lorsque la Société de l’assurance automobile du Québec demande contre la volonté de la victime le versement de la rente d’invalidité (art. 105.1 de la Loi sur les rentes du Québec).

Cependant, si l’individu a déjà fait une demande avant 60 ans et a été reconnu invalide, il est impossible de suspendre les prestations pour éviter les pénalités.

7.    Intégration de la RI : Si mon assurance privée ou la SAAQ m’oblige à réclamer la RI ou la RR, pour avoir droit aux prestations d’invalidité, vais-je subir la pénalité à 65 ans?

Oui, c’est ce que l’on appelle l’intégration de vos rentes. Par ce phénomène, un tiers peut bénéficier de votre RI ou votre RR à votre compte. Lorsque vous arriverez à 65 ans, même si vous n’avez jamais reçu d’argent directement de RQ, vous subirez la pénalité.

Cette situation se produit souvent avec les compagnies d’assurances privées.  Ces dernières vont inclure dans leur contrat d’assurance des clauses d’intégration qui vous obligeront à demander votre RR ou votre RI à Retraite Québec si vous voulez de pleines prestations d’invalidité. Si vous ne le faites pas, la compagnie d’assurance soustrait des prestations d’invalidité le montant de la RI que vous auriez pu recevoir. En acceptant de réclamer vos rentes, vous subirez la pénalité à 65 ans.

De la même façon, lorsque l’invalidité résulte exclusivement d’un accident automobile et que la SAAQ vous déclare complètement invalide, elle vous offrira une indemnité de remplacement du revenu. Si cette dernière est inférieure au montant de la RI auquel vous avez droit, elle fera une demande pour que votre RI lui soit versée directement (art 105.1 de la Loi). RQ prendra donc les montants de la RI et les versera à la SAAQ qui vous donnera une pleine indemnité de remplacement du revenu. Lorsque vous arriverez à 65 ans, vous subirez la pénalité.

B.   Questions sur les recours présentement au TAQ et devant la CS

8.    Comment MÉMO-Qc en est-il venu à supporter ce dossier ?

En 2013, après consultation de divers spécialistes, MÉMO-Qc a constaté que la pénalité prévue à l’article 120.2 de la Loi était une pénalité très préjudiciable pour les personnes en situation de handicap, ce qui n’était pas reconnu par la RéRQ. MÉMO-Qc a donc appelé la RQ, qui s’est justifiée en niant l’existence d’appauvrissement lié à la pénalité puisque celle-ci était compensée par la pension de la Sécurité de vieillesse du gouvernement canadien. MÉMO-Qc n’a pu se satisfaire de cet argument erroné. Effectivement, la pénalité crée un appauvrissement majeur pour les bénéficiaires et ce, malgré le programme fédéral.

Nous avons alors entamé un processus de défense des droits. Nous avons donc sollicité la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (ci-après « CDPJ ») ainsi que le Protecteur du citoyen, qui se sont lancé la balle sans vouloir se saisir du dossier. À force d’insistance, nous avons pu obtenir de la CDPDJ une étude approfondie et la production d’un avis reconnaissant le caractère discriminatoire de l’article 120.2 de la Loi. Cet avis recommandait de supprimer ledit article. Le Protecteur du citoyen a, quant à lui, décliné compétence et refusé d’analyser le dossier, « considérant que cette décision (l’adoption de l’article 120.1 de la Loi) découle d’une orientation gouvernementale qui ne (lui apparaissait) (…) pas déraisonnable ». L’avis de la CDPDJ a été utile pour interpeller à nouveau le gouvernement avec davantage de munitions et la Commission des finances publiques a organisé la consultation Consolider le Régime de rentes du Québec pour renforcer l’équité intergénérationnelle. Bien que cette consultation ait été privée, c’est à force d’insistance que nous avons pu y participer. Nous avons déposé plus de 80 mémoires issus du milieu communautaire, dont notre mémoire Régime des rentes du Québec et personnes handicapées : Quand retraite rime avec discrimination, qui est disponible sur notre site internet. Nous demandions 1) l’abrogation de la disposition problématique et 2) une compensation rétroactive des personnes lésées. Nous n’avons toujours pas de retour de la part du gouvernement malgré de multiples relances au ministre des Finances du Québec.

Il faut mentionner que le gouvernement de la CAQ, avant son élection, nous soutenait dans nos revendications, mais ses promesses sont devenues peau de chagrin dès son arrivée au pouvoir. Les diverses autorités politiques en place depuis notre entrée dans la bataille sont frileuses à se positionner. Les politiciens instrumentalisent le fait que le dossier soit devant les tribunaux pour justifier leur inaction et souhaitent attendre la conclusion du Tribunal administratif du Québec (ci-après « TAQ ») avant de se positionner.

Il faut dire que MÉMO-Qc a endossé cette cause bien qu’elle dépasse la mission de notre organisme. L’invalidité peut toucher un ensemble de profils d’individus ayant des limitations autres que fonctionnelles. Nous n’avons pourtant pas de soutien direct et concret d’autres organismes, ce qui est dommage. Nous ne cesserons cependant pas la lutte! Nous comprenons qu’à 65 ans, soit l’âge vénérable auquel les coupures frappent, les gens sont fatigués et n’ont pas nécessairement la force de se battre. Dans un pays aussi riche que le nôtre, il est inacceptable que la stratégie du gouvernement pour renflouer ses coffres repose sur l’appauvrissement des personnes en situation de handicap et ce, dans la période où ces personnes sont les plus vulnérables et ont le plus besoin de fonds.

9.    Description des recours en cours : Quels recours sont présentement en cours ?

●               Recours collectif de 2021 :

  •  :

Le demandeur est un ancien bénéficiaire de la RI âgé de plus de 65 qui a subi les pénalités et qui agit pour le compte de « toutes personnes vivantes ou défuntes (par le biais de leurs successions) ayant perçu des rentes ou prestations d’invalidité entre l’âge de 60 et 65 ans et s’étant vues imposer une pénalité à leurs rentes de retraite versées à partir de l’âge de 65 ans »[4]. Les défendeurs sont la RQ et le Procureur général du Québec. Le recours est à la Cour supérieure (ci-après : « CS »). Les conclusions de la CS bénéficieront à un groupe défini dans la demande.

  • :

Nous sommes en attente des conclusions des dossiers devant le TAQ. La CS a conclu que seul le TAQ est compétent pour entendre des dossiers relatifs au RéRQ et à la Loi[5]. Elle a donc refusé de se positionner sur les demandes relevant de l’inconstitutionnalité et du préjudice matériel. Elle a cependant confirmé sa compétence pour les questions de dommages et intérêt punitifs et moraux. Il faut donc attendre que le TAQ entende le dossier pour que la CS puisse s’y repencher. Il n’y a pas de date d’audience annoncée au TAQ et il y a fort à parier que nous devrons attendre les conclusions des dossiers individuels avant de connaître la stratégie qui sera mise de l’avant.

●               Recours individuels devant le TAQ :

Il est à noter que pour aller plus loin, nous vous invitons à consulter le PowerPoint de la conférence.

On compte 6 recours avec 6 demandeurs différents qui ne présentent que leurs intérêts personnels. Dans chacun d’eux, les défendeurs sont RQ et le Procureur général du Québec et les recours sont au TAQ. Ces recours ne bénéficieront directement qu’aux personnes représentées. Ils comportent des arguments plus généraux (par exemple en matière de discrimination basée sur le handicap, l’âge, la condition sociale et la pauvreté structurale), mais aussi des arguments individuels propres à chaque dossier. (Voir Q11 pour savoir comment les recours auront un impact sur vous).

  • (à noter qu’elles peuvent varier d’un dossier à l’autre):

Les 6 dossiers ont été joints, c’est-à-dire qu’ils seront tous entendus en même temps. Nous attendons que le TAQ nous propose des dates d’auditions. C’est à l’audition que les avocats pourront faire entendre leurs témoins et procéder aux plaidoiries. Nous devrions avoir plus d’information au mois de mars 2022.

10.Les cas types : Qui sont les requérants dans les recours individuels et en quoi la diversité de leurs profils est-elle importante?

Dans le recours actuel auprès du TAQ, il existe 6 profils de personnes, en prenant soin d’impliquer des hommes et des femmes aux profils différents. Par cette stratégie, le tribunal sera en mesure de comparer les profils et de nous indiquer dans quelles situations l’application de la Loi est (ou non) conforme aux chartes protégeant les droits de la personne.

Ces profils types sont aussi accompagnés par des avocats et des intervenants aux spécialités différentes. Me Julius Grey est un constitutionnaliste réputé en matière de Charte canadienne, Me Foutnier et Me Montpetit sont avocates à la CDPDJ et sont spécialisées en matière de Charte québécoise et Me Laporte, Me Mongeon et Me Corobow exercent en droit civil et administratif. Cette pluralité des cas permettra au TAQ d’évaluer plus largement la notion discriminante au regard de la pénalité appliquée.

11.Impact des recours en cours : Les conclusions de ces recours auront-elles des impacts sur moi ?

  1. tout dépend de votre situation :
  • on envoi : vous pouvez la contester en fournissant des motifs du délai de la transmission de votre contestation.

12.Effet rétroactif des recours en cours : Les personnes de plus de 60 ans n’ayant pas participé au recours vont-elles cesser de subir les pénalités et seront-elles remboursées pour les pénalités déjà payées?

Il est impossible d’en être certains, mais il est probable que ces personnes continueront de subir les pénalités et qu’elles ne seront pas compensées. Or, la décision reste entre les mains du parlement.

Dans l’hypothèse où nous faisons déclarer l’article 120.2 de la Loi inopérant, le gouvernement se contenterait probablement de modifier cet article pour le futur.

Une loi a un effet immédiat, mais rarement un effet rétroactif. Il est donc peu probable, même si le gouvernement choisissait demain matin de modifier la Loi, que les bénéficiaires ayant déjà 65 ans soient soustraits à cette pénalité ou aient une compensation pour les années où ils ont été pénalisés. Le jugement n’aurait pas d’effet direct et automatique pour ces personnes. D’où l’importance d’inscrire votre dossier au TAQ à vos 65 ans. (Voir Q14 sur la contestation ou la Q18 sur les recours résiduels si vous n’avez pas fait votre contestation à temps).

13.Quand verrons-nous les conclusions du jugement ?

Ce sera très long puisque l’affaire ira probablement en appel et qu’il existe plusieurs paliers d’appels. Le TAQ n’a pas l’habitude de jouer avec des notions de discrimination et de Charte. On y invoque rarement ces débats, mais nous devons commencer là pour avoir accès aux tribunaux supérieurs qui, eux, en ont plus l’habitude.

Si nous perdons et que nous avons matière à demander d’aller en appel, nous le ferons. De la même façon, si nous gagnons, il est clair que RQ et le procureur vont faire de même. MÉMO-Qc s’engage cependant à tout mettre en œuvre pour influencer RQ de façon à ce qu’elle ne conteste pas la décision.

C.   Recours possible pour la contestation de la diminution des prestations :

14.Étapes de la contestation : Quelles sont les étapes à suivre pour espérer profiter des effets des recours en instances au TAQ ?

ÉtapesDémarches à entreprendre de votre partDélais
  (Voir Q15 pour plus d’information sur cette lettre)À contester au service de révision en remplissant le formulaire à cet effet.   Démarche gratuite.   (Voir Q15 i « demande de révision » pour plus d’informations)90 jours suivants l’envoi de la décision. (La date d’envoi est inscrite en haut à droite de l’avis)
À contester au TAQ.   Démarche gratuite.   (Voir Q14 ii pour savoir comment contester la décision)60 jours suivant l’émission de la lettre. (La date d’envoi est en haut à gauche de la lettre)
Demander la suspension de mon dossier au TAQ en attendant les résultats des recours.   (Voir Q14 iii pour plus d’information)NA
Le TAQ vous contactera et vous donnera une date d’audition. Si cela est en votre faveur, vous pourrez invoquer les conclusions des dossiers présentement en cours.NA
  1.  : Suivant la réception de la décision de RQ, vous avez 90 jours[6] à parti de la date inscrite en haut à droite de la décision pour en demander la révision au Service de révision de RQ avec le formulaire disponible en ligne[7]. Pour de l’assistance, vous pouvez communiquer avec RQ par téléphone aux coordonnées ci-dessous. Vous pourrez faire parvenir ce formulaire au Service de révision en ligne [8] ou par la posteà l’adresse suivante : 
Adresse : Service de révisionRégime des rentes du Québec (de 8h à 17h du lundi au vendredi)
Retraite QuébecRégion de Québec418 643-5185
Case postale 5200Région de Montréal514 873-2433
Québec (Québec) G1K 7S9Sans frais1 800 463-5185
  1.  : Le Service de révision vous enverra une lettre qui maintiendra la décision originale de diminuer vos prestations. Vous avez alors 60 jours pour envoyer une lettre au Secrétariat du TAQ en remplissant le formulaire de Requête introductive disponible en ligne[9] ou simplement en écrivant au TAQ pour expliquer pourquoi vous contestez. Vous pouvez envoyer le tout en ligne[10] ou aux adresses suivantes :
TAQ Montréal
500, boulevard René-Levesque Ouest, 21e étage
Montréal (Québec) H2Z 1W7
Tél. : 514 873-7154
Sans frais : 1 800 567-0278  
TAQ Québec
575, rue Jacques-Parizeau, rez-de-chaussée
Édifice Lomer-Gouin
Québec (Québec) G1R 5R4
Tél. : 418 643-3418
Sans frais : 1 800 567-0278  
  1.  : Suite à la réception de la Requête, le TAQ vous transférera une confirmation de réception par écrit. RQ vous transférera dans les semaines qui suivent une copie de votre dossier. Après un certain délai (variant autour de 6 mois), le TAQ organise généralement une conférence de gestion. Il s’agit d’une rencontre par laquelle vous et RQ devrez donner vos intentions. Par exemple, si vous voulez des témoins, les dates de présentation de la preuve, etc. Il est important d’avoir à jour tous vos documents et d’être bien préparés. Vous pourrez alors présenter en demande préliminaire la suspension de votre dossier en attendant une décision sans appel des dossiers en cours pour vous aider à orienter votre recours[11]. Le Tribunal vous invitera alors à faire une demande écrite et plus détaillée. 

15.Quand dois-je faire ma contestation?

À la suite de la réception d’un Avis de modification de RQ vous informant officiellement de la diminution de vos prestations à l’âge de 65 ans. La date d’émission inscrite en haut à droite de l’avis fait commencer votre délai de contestation. Vous avez 90 jours à partir du jour ouvrable suivant cette date d’émission pour répondre, sinon vous ne pourrez pas déposer votre dossier au TAQ. Il ne vous restera que les recours résiduels (voir Q18).

Pour savoir s’il s’agit de la lettre à contester et non d’un simple avis, consultez un exemple à l’Annexe A et demandez-vous si :

  • : Avis de modification;

16.Puis-je faire ma contestation avant la réception de l’Avis de modification, par exemple si je reçois un simple avis m’informant des changements qui s’appliqueront à ma RI?

Non, vous devez attendre de recevoir la lettre officielle vous informant de la décision de RQ. Si tel n’est pas le cas, vous ne pouvez entamer de démarches judiciaires. Si vous avez reçu une lettre, mais n’êtes pas certain qu’il s’agisse de la décision ou d’un avis, référez-vous à la Q15 concernant le moment de contestation et à l’Annexe 1.

Cependant, vous pouvez militer pour un changement législatif par une implication auprès d’organismes comme MÉMO-Qc qui supportent cette cause. Si tel est le cas, communiquez avec Anabelle Grenon Fortin, agrenonfortin@moelleepiniere.com, (514) 341-7272 poste 219.

17.Dans un recours au TAQ ou à la RéRQ, dois-je être représenté par un avocat? Est-ce pertinent de se faire représenter par un avocat?

Au TAQ, comme à la RéRQ, vous avez le choix de vous représenter seul ou d’être représenté par un membre du barreau (un avocat). Si vous invoquez la discrimination basée sur les chartes, comme nous le faisons en ce moment, il est fortement suggéré d’engager un avocat puisque ce sont des questions très complexes.

Cependant, si vous demandez la suspension de votre dossier en attendant le résultat des recours en cours, un avocat n’est pas particulièrement nécessaire. De plus, si le jugement nous est favorable, il sera plus facile pour vous de l’invoquer dans votre dossier. Par contre, être conseillé dans un recours est toujours pertinent. (Voir Q14 pour connaître les étapes à suivre si vous voulez contester vous-même votre dossier).

D.  Votre délai de contestation est dépassé

18.Recours résiduels : Vous avez reçu la décision de Retraite Québec de diminuer vos prestations et votre recours au TAQ est échu, quels recours vous reste-t-il?

En théorie, si vous laissez s’écouler 3 mois suivant la décision de RQ, votre recours en révision est échu et vous ne pouvez plus présenter votre dossier au TAQ. Vous devrez alors espérer que le Parlement procède à une modification de la Loi. Cependant, la plupart du temps, si un tribunal juge qu’un article de loi contrevient aux chartes, le Parlement modifie la loi pour les générations futures.

Voici cependant des recours résiduels intéressants dépendamment de votre situation :

Les motifs valables sont :

  • (ex : maladie, déménagement, décès)

ATTENTION : L’ignorance de la loi n’est pas un motif recevable.

Notez que chaque cas est un cas d’espèce et on ne peut pas appliquer de règle générale. Si votre demande est acceptée, vous pourrez faire votre demande de révision. (Voir Q14 ii contestation et 14 iii suspension)

E.    Questions générales sur les rentes d’invalidité

19.Pour être admissible aux prestations de la RI, il faut être atteint d’une invalidité grave et prolongée. Que veut dire la Loi par « grave et prolongée »?

Pour les personnes de moins de 60 ans[12], l’incapacité « grave » signifie l’incapacité d’occuper tout emploi rémunérateur. Cela implique que la limitation fonctionnelle affecte les capacités mentales, physiques ou psychologiques d’une façon tellement sévère qu’occuper tout emploi rapportant un revenu est impossible. Pour évaluer ce facteur, RQ ne prend pas en compte le niveau de scolarité, les capacités intellectuelles et la disponibilité des emplois. C’est un facteur indépendant de votre niveau d’employabilité. Pour plus d’information, référez-vous au Guide du médecin traitant – L’invalidité dans le Régime de rentes du Québec[13] qui explique les critères d’établissement d’une invalidité grave. Pour pousser votre réflexion, sachez que ce guide a un équivalent pour les citoyens qui explique dans quelles conditions le gouvernement a établi ces critères.

L’incapacité « prolongée » signifie qu’à moyen ou à long terme, la condition médicale ne pourra pas s’améliorer. Cela signifie (1) qu’il faut avoir essayé tous les traitements possibles, (2) qu’il doit y avoir une stabilité dans la condition médicale et (3) qu’il ne doit pas y avoir de chance d’amélioration significative. Les critères de l’incapacité (c’est-à-dire graves et prolongés) sont intimement liés. Ainsi, beaucoup d’individus ne sont pas admissibles à la RI parce qu’ils suivent toujours des traitements. Il faut alors démontrer par une preuve médicale que le traitement vise à éviter la dégradation de la condition et non son amélioration.

20.Revenu de base : Une personne de moins de 65 ans percevant la RI peut-elle travailler sans que le montant de sa RI diminue?

Oui. Vous pouvez travailler sans diminution de votre RI si vous répondez à 2 critères : (1) votre revenu brut ne dépasse pas 3 600 $ sur une période de 3 mois consécutifs et (2) vous êtes toujours invalide[14].

21. Que prend en compte Retraite Québec pour calculer la RI avant 65 ans?

D’abord, on doit regarder si la personne est admissible. Pour ce faire, on se réfère aux cotisations que la personne a versées au RéRQ. Généralement, le montant des prestations de la RI ne varie pas en fonction des cotisations passées, mais le nombre d’années de cotisation va influencer l’évaluation de l’admissibilité à la RI[15]. En d’autres mots, vous pourriez être exclu si vous ne respectez pas les critères de base en matière de cotisation, c’est-à-dire avoir cotisé à 2 des 3 dernières années, à 5 des 10 dernières années, ou à plus de 50% depuis 1966.

Si vous répondez à ces critères, le montant de la RI est normalement fixe pour tous les individus.

La RI est fixe et n’est pas influencée par le revenu familial ou du conjoint, ni par le revenu d’emploi ou d’entreprise si ce dernier ne dépasse pas le revenu de base (voir Q20 sur le revenu de base).

Il faut cependant savoir que l’on ne peut cumuler une rente pour conjoint survivant et une pleine RI. Ainsi, si vous recevez une rente pour conjoint survivant, il y aura une intégration des prestations jusqu’à l’atteinte du montant maximal de la plus élevée des 2 rentes.

F.    Annexe 1 : Exemple d’Avis de modification officielle de RQ visant la diminution de vos prestations à 65 ans VS un simple avis


[1] Les prestations du programme de la Sécurité de la vieillesse (SV) comprennent la pension de base de la SV destinée aux aînés de 65 ans et plus qui satisfont aux exigences relatives au statut juridique et au lieu de résidence. Il fournit également le Supplément de revenu garanti (SRG) aux pensionnés à faible revenu et les allocations aux personnes à faible revenu âgées de 60 à 64 ans dont l’époux ou le conjoint de fait touche les prestations du SRG ou est décédé. Voir Gouvernement du Canada, Sécurité de la Vieillesse, En ligne : <https://www.canada.ca/fr/emploi-developpement-social/programmes/securite-vieillesse.html>

[2] Moelle épinière et motricité Québec, Régime des rentes du Québec et personnes handicapées : Quand retraite rime avec discrimination, 2014. En ligne : <https://www.moelleepiniere.com/wp-content/uploads/downloads/2017/01/M%C3%A9moire-RRQ-M%C3%89MO-Qc.pdf> à la p. 11.

[3] La jurisprudence désigne l’ensemble des décisions des tribunaux qui créent certaines règles générales de droit.

Par exemple, la Cour supérieure a déclaré qu’elle n’avait pas la compétence de prendre des décisions par rapport à la Loi sur le régime de retraite du Québec. Seul le TAQ à cette compétence. Cette décision a fait jurisprudence, il s’agit donc d’une règle de droit que l’on peut tenir pour acquis même si elle n’est pas dans une loi.

[4] McLean c. Procureur général du Québec, 2021 QCCS 2920. En ligne :   <https://www.canlii.org/fr/qc/qccs/doc/2021/2021qccs2920/2021qccs2920.pdf> à la p 1.

[5] Ibid à la p 4 et ss.

[6] Retraite Québec, Vous souhaitez contester une décision prise en révision. En ligne : <https://www.rrq.gouv.qc.ca/fr/invalidite/Pages/recours.aspx>.

[7] Régime de rentes du Québec Retraite Québec, Formulaire : Demande de révision (Retraite, décès ou partage des revenus). En ligne :  <https://www.rrq.gouv.qc.ca/SiteCollectionDocuments/www.rrq.gouv.qc/Francais/formulaires/regime_rentes/B026-1_fr.pdf>.

[8] Retraite Québec, Transmettre un document par Internet. En ligne : <https://www.retraitequebec.gouv.qc.ca/fr/services-en-ligne-outils/Pages/transmettre-un-document-par-Internet.aspx?_ga=2.202182424.824362310.1640035735-1655453149.1637187066>.

[9] Tribunal administratif du Québec, Formulaire : Requête introductive d’un recours. En Ligne : <https://www.taq.gouv.qc.ca/documents/file/publications/formulaires/recours-introductif/formulaire_recours_introductif.pdf>.

[10] Tribunal administratif du Québec, Déposer un recours en ligne.En ligne : <https://riil.servicestaq.gouv.qc.ca/taq.riil.presentation/>.

[11]Tribunal administratif du Québec, Cheminement d’un recours, En ligne :  <https://www.taq.gouv.qc.ca/fr/deposer-un-recours/cheminement-d-un-recours/preparation-a-la-conciliation-et-a-l-audience>.

[12] Par opposition aux personnes de plus de 60 ans dont l’incapacité grave se limite à la rendre incapable d’exercer son occupation habituelle. Voir Loi sur le régime de rentes du Québec, ch. R-9. En ligne : <legisquebec.gouv.qc.ca/fr/document/lc/R-9> art.95 al 2. (« La Loi »)

[13] Retraite Québec, Guide du médecin traitant – L’invalidité dans le Régime de rentes du Québec. En ligne : <https://www.retraitequebec.gouv.qc.ca/fr/publications/nos-programmes/regime-de-rentes-du-quebec/invalidite/Pages/guide-du-medecin-traitant-invalidite-dans-le-regime-de-rentes-du-quebec.aspx>.

[14] Retraite Québec, Le retour au travail et les prestations pour invalidité.  En ligne : <https://www.rrq.gouv.qc.ca/fr/invalidite/travail/Pages/regime_rentes.aspx>.

[15] La Loi, supra note 12, aux arts 106 et 106.1.